Par Louis Alexandre de Froissard le 16/09/13

Démembrement de propriété et répartition des bénéfices : les solutions

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 Qu’est ce que le démembrement de propriété ?

 Le démembrement de propriété est souvent la solution la plus avantageuse fiscalement pour transmettre des biens. 

Démembrer un bien, c’est diviser la propriété  entre, d’une part un usufruitier qui possède le droit d’utiliser le bien et d’en percevoir les éventuels revenus (les parents durant leur vie – par exemple), et d’autre part un (ou des) nu-propriétaire(s) (enfants,..),

Fiscalement, cette transmission est qualifiée de donation par l’administration. En tant que telle, elle est assujettie aux droits de mutation à titre gratuit. 

Si des mécanismes permettent d’alléger le montant des droits de succession, le démembrement de propriété reste souvent la solution la plus efficace en la matière. 

Optimiser les choses ?

Or, durant la vie du démembrement les enfants ne sont pas censés recevoir plus que la part des parents sous peine de revêtir la qualification de donation imposable fiscalement. 

Lorsqu’il s’agit de parts de société il ya plus de latitude. En présence d’une société civile, elle-même propriétaire du bien, les parents et les enfants seront associés. La répartition des fruits pourra différer de celle du capital. 

Une répartition inégalitaire des bénéfices ou des pertes dans une société est autorisée, la seule limite étant celle par laquelle un associé se réserve la « part du lion », autrement dit seule la clause dite « léonine » est prohibée.

  démembrement de propriété

Démembrement de propriété et repartition inégale des benefices : les solutions 

 Le fait qu’une répartition inégale soit établie entre usufruitier et nu-propriétaire est tout à fait licite. La seule obligation en la matière est de ne pas réduire à néant le droit de jouissance de l’usufruitier.

A titre d’exemple, il est possible de prévoir qu’à l’origine les parents vont détenir 95% de l’usufruit et les enfants 5%, et de décider par la suite, lors d’une assemblée générale, que  chacun des parents  va recevoir 20% des dividendes et les enfants se répartiront les 60% restants, sans que cela soit qualifié de donation indirecte, et ce bien que les parents renoncent à  60% de leur part aux dividendes (*). 

Autre exemple : la  mise en réserve des bénéfices par l’usufruitier. Il s’agit pour l’usufruitier de distribuer peu ou pas de fruit alors qu’il a la possibilité de le faire. De fait les réserves augmentent, et lors de son décès il transmet plus que la valeur initiale de la donation.

Dans ces deux cas de figure, l’administration pourrait être tentée de dire qu’il s’agit d’une donation indirecte. Mais, on peut également considérer que :

  •  d’une part le caractère non définitif de la mise en réserve peut justifier l’absence de donation. En effet, avant l’approbation des comptes de l’exercice par l’assemblée générale les bénéfices réalisés par une société n’ont pas la nature de fruits (**).
  • D’autre part, la modification de la répartition des bénéfices entre nu-propriétaire et usufruitier ne constitue pas non plus une donation indirecte taxable au profit du premier. 

 

Conclusion

En cas de besoin, les enfants peuvent aujourd’hui bénéficier de revenus , alors même que le schéma initial repose sur une donation avec réserve d’usufruit. D’autre part, la mise en réserve par l’usufruitier peut-être une solution pour augmenter les effets d’une donation  sans que cela soit qualifié de donation indirecte. Nous sommes à votre disposition pour vous donner des exemples s’appliquant à votre patrimoine.

 

* : Dans les faits, il s’agissait d’une répartition de parts de société entre les membres d’une même famille. Les parents détenaient 95% de l’usufruit contre 5% pour les enfants. La nue-propriété du bien revenait dans sa totalité aux enfants. Lors d’une assemblée, les associés, enfants et parents ont décidé une répartition des dividendes radicalement différente de leurs droits aux bénéfices. Les parents allaient recevoir 34% des dividendes et les enfants 61%. Pour l’administration fiscale il s’agissait la d’une hypothèse de donation indirecte soumise aux droits de mutation à titre gratuit. La cour d’Appel de Paris a suivi le raisonnement de l’administration en refusant la demande de décharge de droits d’enregistrement des époux. Ces derniers ont alors saisi la Cour de Cassation qui s’est prononcée en leur faveur.

La Haute Juridiction a considéré que la décision de modification de la répartition des bénéfices est une décision collective des associés et non pas une donation indirecte. Mais aussi, qu’il ne pouvait y avoir de donations sur des biens dont les époux n’avaient jamais étaient propriétaires. Ce raisonnement peut s’appliquer aussi bien aux sociétés civiles que commerciales. 

** : La jurisprudence s’accorde également sur cette possibilité. Récemment, une question s’est posée au juge, celle de savoir si une mise en réserve des bénéfices par un usufruitier ne constituait pas une donation indirecte au profit du nu- propriétaire, libéralité taxable fiscalement. A cette question les juges de la Haute Juridiction ont répondu par la négative en argumentant le fait qu’avant l’approbation des comptes de l’exercice par l’assemblée générale les bénéfices réalisés par une société n’ont pas la nature de fruits. Avant cette attribution, l’usufruitier n’a donc aucun droit sur les bénéfices, dès lors si l’assemblée générale décide de les affecter à un compte de réserve cela ne peut en aucun cas constituer une donation indirecte au profit du nu-propriétaire  (Cass com 10 février 2009).

 

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Louis Alexandre de Froissard
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