Par Louis Alexandre de Froissard le 25/12/13

 

Plafonnement ISF et assurance-vie :

un retour à l’orthodoxie juridique ?

 

Jean-Marc Vié,

Maître des requêtes au Conseil d’Etat

 

ISF

 

Synthèse : Le Conseil d’Etat annule l’instruction du 14 juin 2013 intégrant les intérêts annuels des fonds en euros des contrats d’assurance-vie dans les revenus à prendre en compte pour le plafonnement de l’ISF, au motif que la prise en compte de ces revenus latents n’est pas prévue par la loi.

Le Conseil constitutionnel avait déjà censuré la loi de finances pour 2013 pour avoir retenu de tels revenus non réalisés ou dont le contribuable n’avait pas disposé, en méconnaissance de l’exigence de prise en compte des facultés contributives du redevable. La loi de finances pour 2014 pose des questions similaires.

 

 

Par une décision du 20 décembre 2013 (CE, 8e et 3e sous-sections, 20 décembre 2013,AXA FRANCE VIE, M. ELIAS et autres, M. LACROIX-WASOVER, requêtes n° 371157, 372625, 372675) le Conseil d’Etat vient, en ce temps de Noël, donner un bol d’oxygène aux redevables de l’ISF pour le calcul du plafonnement du montant total de leurs impôts à 75 % de leurs revenus. La Haute assemblée annule en effet les paragraphes 180 (en tant qu’il concerne les produits attachés aux bons et contrats de capitalisation ainsi qu’aux placements de même nature – assurance-vie), et 200 de l’instruction fiscale BOI-PAT-ISF-40-60 « ISF – Calcul de l’impôt – Plafonnement » publiée au bulletin officiel des finances publiques-impôts le 14 juin 2013.

 

Ces dispositions constituent le commentaire administratif de l’article 885 V bis du code général des impôts dans sa version résultant de la loi de finances pour 2013, qui concerne les modalités de calcul du plafonnement de l’ISF. L’article 885 V bis précise ainsique le montant à payer doit être réduit de la différence entre le total des impôts sur le revenu les produits payé en France et 75 % du total des revenus mondiaux de l’année précédente,déduction faite des déficits autorisés par l’article 156, ainsi que des revenus exonérés et des produits soumis à un prélèvement libératoire. Dans le bulletin officiel annulé, publié quelquesjours seulement avant la date limite des déclarations ISF, l’administration avait provoqué un grand émoi en interprétant l’article 885 V bis comme impliquant que les intérêts des fonds euros des contrats d’assurance-vie  logés dans des contratsmonosupport ou multisupports devaient être pris en compte au titre des revenus pour le calcul du plafonnement de l’ISF.

 

ISF

Le jeu du chat et de la souris

 

Il est intéressant d’observer comment l’administration tente, depuis plusieurs années, de faire prévaloir une interprétation restrictive de ce type de dispositions pour le contribuable, en essayant de se faufiler entre les mailles du filet de la Constitution dressé par le Conseil constitutionnel et d’échapper à la rigueur du principe de légalité défendu par le Conseil d’Etat.

 

Tout commence avec l’instauration du bouclier fiscal créé par la loi de finances pour 2006 et codifié à l’article 1649-0 A du code général des impôts. Cette disposition a permis larestitution de la fraction des impositions excédant un certain seuil, fixé par le législateur. Le« revenu réalisé » à prendre en compte pour ce droit à restitution comprenait notamment,s’agissant des contrats d’assurance-vie, les revenus des « bons ou contrat de capitalisation et des placements de même nature, autres que ceux en unité de compte ». L’administration fiscale a profité de l’imprécision de ces termes pour ajouter, par une instruction du 26 août 2008, que ce revenu incluait, dès leur inscription en compte, les produits des fonds en euros des contrats multisupports investis à plus de 80 % sur des supports en euros. Mais, par une décision du 13 janvier 2010 (CE, 8e et 3e sous-sections, 13 janvier 2010, requête n° 321416, Nemo), le Conseil d’Etat a annulé ce commentaire. Il a relevé qu’il résultait des dispositions du 6° de l’article 1649-0 A, éclairées par les travaux préparatoires de la loi, que le législateur avait entendu regarder comme réalisés dès leur inscription en compte, pour la détermination du droit à restitution, les produits des seuls contrats d’assurance-vie dits monosupport investis exclusivement en euros à l’exclusion de ceux des contrats dits multisupports. La Haute assemblée juge ainsi que l’administration a posé des règles qui ne se trouvaient pas dans la loi et qu’il n’appartenait donc qu’au législateur de fixer en prévoyant que le revenu tiré du fonds en euros d’un contrat multisupports était réputé réalisé à la date de son inscription en compte et, à ce titre, pris en compte pour la détermination du droit à restitution lorsque l’épargne était en réalité exclusivement ou quasi exclusivement investie sur le fonds en euros pendant la majeure partie de l’année. On sait en effet que ces produits ne sont pas définitivement acquis dans la mesure où ils peuvent être réinvestis par le souscripteur vers des supports en unités de compte et en subir les fluctuations.

 

La loi de finances pour 2011 a ensuite rectifié cet « incident contentieux » en soumettant les produits des contrats d’assurance-vie en euros aux prélèvements sociaux, ainsi que les fonds euros des contrats multisupports. Par un jeu de renvois de textes, ces produits sont ainsi rentrés dans le champ des revenus pris en compte pour le calcul droit à restitution dans le cadre du bouclier fiscal. Le Conseil constitutionnel ne s’est prononcé que sur la régularité de l’adoption de ces dispositions (décision n° 2010-622 DC du 28 décembre 2010), qu’il a validée, mais pas sur le fond.

 

C’est la suppression du bouclier fiscal en 2011 qui a ensuite donné naissance au mécanisme du plafonnement pour l’ISF : il reprend pour l’essentiel les mêmes principes, en limitant à 75 % des revenus de l’année antérieure le montant de l’impôt sur le revenu de l’année antérieure et de l’ISF de l’année en cours, additionnés. Mesure coûteuse s’il en est pour le budget de l’Etat : près de 730 millions d’euros cette année, selon les informations parues dans la presse. Ceci explique sans doute la rédaction du II-2° de l’article 885 V bis du code général des impôts dans la loi de finances pour 2013, qui prévoyait que les revenus réalisés comprenaient notamment la « variation de la valeur de rachat des bons ou contrats de capitalisation, des placements de même nature, notamment des contrats d’assurance-vie, ainsi que des instruments financiers de toute nature visant à capitaliser des revenus ». Ainsi, les revenus pris en compte pour le droit au plafonnement devaient comprendre des revenus virtuels, fondés sur l’estimation de la valeur vénale du patrimoine immatériel réalisable qui était détenu.

 

Dans sa décision n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012, le Conseil constitutionnel n’a pas laissé passer cette disposition. Il a relevé que l’article 13 de cette loi de finances en cause rétablissait un régime de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) proche de celui existant avant la loi de finances pour 1999, avec un seuil d’entrée relevé à 1,3 million d’euros et des taux marginaux similaires, mais un dispositif de plafonnement différent. Il a également rappelé sa jurisprudence énoncée dans sa décision n° 98-405 DC du 29 décembre 1998 selon laquelle « en raison de son taux et de son caractère annuel, l’impôt de solidarité sur la fortune est appelé normalement à être acquitté sur les revenus des biens imposables ». Mais ce principe avait, il est vrai, évolué dans sa décision n° 2010-99 QPC du 11 février 2011, Mme Laurence N., selon laquelle, en instituant l’ISF, le législateur avait entendu frapper la capacité contributive que confère la détention d’un ensemble de biens et de droits, de sorte que la prise en compte de cette capacité contributive n’impliquait pas que seuls les biens productifs de revenus entrent dans l’assiette de cet impôt. Le Conseil constitutionnel fait ainsi la synthèse de sa jurisprudence en posant que la prise en compte des facultés contributives « n’implique ni que seuls les biens productifs de revenus entrent dans l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune ni que cet impôt ne doive être acquitté qu’au moyen des revenus des biens imposables ». Sur ce fondement, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution le nouveau barème de l’ISF. Mais il a toutefois censuré l’intégration dans le calcul du plafonnement de l’ISF des bénéfices ou revenus que le redevable n’avait pas réalisés ou dont il ne disposait pas en estimant que cette intégration méconnaissait l’exigence de prise en compte des facultés contributives du redevable. En effet, étaient traitéscomme des revenus des sommes qui n’avaient pas toutes été effectivement perçues et qui pouvaient dans certains cas ne jamais l’être. En outre, la prise en compte de ces revenus latents au dénominateur pour le calcul du plafonnement de l’ISF ne s’accompagnait pas de la prise en compte, dans le même temps, des impôts à acquitter sur ces revenus latents aunumérateur à partir du moment où les impôts en question n’avaient pas été acquittés. Au total, l’inclusion de ces revenus capitalisés ou distribuables non distribués dans le calcul du plafonnement conduisait à faire peser une charge fiscale sur la base d’un revenu présumé, et de surcroît incertain, ou dont le redevable n’avait pas la libre disposition.

 

 

Une tentative de contournement de la jurisprudence constitutionnelle…

 

​La censure constitutionnelle a entraîné, pour l’administration, une révision à la baisse de ses prévisions budgétaires. Pour les contribuables, elle a eu pour conséquence de rendre à nouveau attractifs les contrats d’assurance-vie dans le cadre des stratégies d’optimisation duplafonnement en matière d’ISF.

 

La publication, le 14 juin 2013, de l’instruction attaquée a ainsi pu sembler constituer un retour en arrière, du fait que la valeur des contrats d’assurance-vie en euros a été à nouveau incorporée dans les revenus à prendre en compte pour le plafonnement de l’ISF. La loi étant désormais rédigée en fonction de la décision du Conseil constitutionnel, elle ne pouvait plus connaître de censure. Et la publication d’une instruction, quand bien même elle infléchissait dans un sens protecteur des finances publiques la portée de cette loi, permettaitd’échapper à une nouvelle sanction constitutionnelle directe.

 

​L’administration, à sa décharge, a tenté de prévenir certains comportementsd’optimisation fiscale à travers des contrats d’assurance-vie et pouvait en outre se prévaloir de la notion large de revenus précédemment définie par le Conseil constitutionnel à propos du bouclier fiscal. Mais, dans la mesure où la question ne relevait pas exactement de l’assiette d’une imposition, mais de son plafonnement, deux principes devaient toutefois être conciliés avec cette définition : celui de l’égalité devant les charges publiques qui justifiait l’instauration d’un mécanisme de plafonnement (décision n° 2012-654 DC du 9 août 2012) et celui de la prise en compte des facultés contributives des contribuables. En effet, par rapport au bouclier fiscal, le nouveau plafonnement n’intègre pas tous les impôts directs, notamment la taxe d’habitation et la taxe foncière, et s’abstient de créer un plafonnement du plafonnement. Et la jurisprudence du Conseil constitutionnel est constante sur le fait que tout mécanisme d’imposition doit prendre en compte la faculté contributive des contribuables de telle sorte qu’elle n’ait pas un caractère confiscatoire. La décision n° 98-405 DC du 29 décembre 1998 constituait à cet égard un avertissement : elle censurait la dispositionprévoyant que la valeur en pleine propriété de biens démembrés devait figurer dans l’assiette d’ISF de l’auteur du démembrement. Cette disposition ne permettait plus de frapper la capacité contributive que confère la détention d’un ensemble de biens, car elle pouvait conduire à assujettir à l’ISF un contribuable nu-propriétaire qui ne tirait aucun revenu des biens en question.

conseil d'état

​… combattue par une QPC

Il était donc loisible de penser avec quelques chances de succès que l’instruction du 14 juin 2013 entrait en contradiction avec ces principes constitutionnels. Et c’est bien l’idée qui a guidé l’un des requérants demandant au Conseil d’Etat l’annulation de cette doctrine administrative, qui a assorti sa requête d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

 

Ce mécanisme permet à tout citoyen, à l’occasion d’un litige faisant application d’uneloi qu’il juge inconstitutionnelle, de renvoyer au Conseil constitutionnel l’appréciation de la constitutionnalité de cette loi avant que ne soit tranché son litige. Le Conseil d’Etat joue un rôle de filtre à cet égard, consistant à déterminer si la disposition dont la constitutionnalité estcritiquée est applicable au litige, nouvelle et sérieuse avant, le cas échéant, de la transmettre au Conseil constitutionnel.

Cette QPC accompagnait ici la demande d’annulation du paragraphe 200 de l’instruction, qui précise que : « les revenus des bons ou contrats de capitalisation et des placements de même nature, notamment des contrats d’assurance-vie, souscrits auprès d’entreprises d’assurance établies en France ou à l’étranger, sont pris en compte, chaque année, pour leur montant retenu pour les prélèvements sociaux au titre du 3° du II de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, reproduit sous l’article 1600-0 D du code général des impôts. / En pratique, cette disposition vise notamment les produits des contrats « mono-support » en euros et des compartiments en euros des contrats « multisupports » à raison de leur montant effectivement retenu pour l’assiette des prélèvements sociaux ».

 

Il était soutenu, de manière originale, que l’article 22 de la loi de finances pour 2011, qui a modifié l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, était inconstitutionnel. L’idée était intéressante car c’est bien cet article 22 qui a étendu l’assujettissement aux prélèvements sociaux des revenus relatifs à la part en euros des bons ou contrats de capitalisation multisupports, alors que seuls les produits des contrats et bons de capitalisation monosupport en euros étaient auparavant concernés. Eu égard au renvoi qui est fait par le paragraphe 200 de l’instruction à l’article L. 136-7, c’est bien l’assujettissement des produits multisupports aux prélèvements sociaux qui justifie leur prise en compte pour le calcul du plafonnement.

 

Toutefois, le Conseil d’Etat juge que les dispositions de l’article 22 ne peuvent pas être regardées comme applicables au litige, au sens du 1° de l’article 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958. Ce n’était pas, en effet, la nouvelle définition des produits soumis aux prélèvements sociaux qui était à l’origine de l’inclusion de ces derniers dans la base de calcul du plafonnement, mais le fait de renvoyer à cette définition par l’instruction attaquée. La Haute assemblée se refuse donc à transmettre la QPC présentée en raison du lien trop indirect entre la disposition critiquée et le litige. Il n’y aurait donc pas d’examen de la conformité de l’instruction attaqué par rapport aux principes constitutionnels, du moins dans l’immédiat.

 

 

L’annulation de l’instruction par le Conseil d’Etat

 

​C’est donc sur le plan de la légalité que le Conseil d’Etat a été amené à censurer directement les paragraphes 180 et 200 de l’instruction attaquée. Pour un motif identique à celui adopté dans la décision Némo du 13 janvier 2010, le Conseil d’Etat estime qu’enprévoyant que doivent être pris en compte chaque année, pour le plafonnement de l’impôt de solidarité sur la fortune défini par l’article 885 V bis du code général des impôts, les revenus des bons ou contrats de capitalisation et des placements de même nature, notamment des contrats d’assurance-vie, l’instruction litigieuse ne se borne pas à interpréter l’article 885 V bis du code général des impôts, mais comporte des dispositions qu’il n’appartenait qu’au législateur de prévoir. Il en conclu que cette instruction est, dans cette mesure, entachée d’incompétence.

 

​En effet, le du I de l’article 885 V bis du code général des impôts se borne à prévoir  que l’ISF « est réduit de la différence entre, d’une part, le total de cet impôt et des impôts dus en France et à l’étranger au titre des revenus et produits de l’année précédente (…) et, d’autre part, 75 % du total des revenus mondiaux nets de frais professionnels de l’année précédente(…) ». Il ne se réfère donc à aucune autre disposition du code général des impôts ou du codede la sécurité sociale. Après censure du II de l’article par le Conseil constitutionnel, il ne mentionne plus parmi les revenus à prendre en compte la « variation de la valeur de rachat des bons ou contrats de capitalisation, des placements de même nature, notamment des contrats d’assurance-vie, ainsi que des instruments financiers de toute nature visant à capitaliser des revenus ».

 

​Or, le paragraphe 180 de l’instruction attaquée précisait que sont pris en compte au titre de ces revenus : « les produits attachés aux bons et contrats de capitalisation ainsi qu’aux placements de même nature (assurance-vie) ». Et comme on l’a vu, le paragraphe 200 de la même instruction ajoutait que ces produits devaient être pris en compte pour leur montant retenu pour les prélèvements sociaux. Dans l’un comme l’autre cas, ces deux paragraphes incluaient dans les revenus à prendre en compte des éléments non prévus par la loi.

 

La compétence du ministre pour prendre les dispositions attaquées était, dans ces conditions, indéfendable. Il est de jurisprudence constante, en effet, qu’une instruction ou une circulaire ministérielle ne peut déroger à la loi, sauf à empiéter sur le pouvoir du législateur qui ne saurait être celui d’un ministre, doté d’un simple pouvoir réglementaire. On notera au passage que c’est toujours incompétemment que le ministre de l’économie et des finances prend des instructions en matière fiscale lorsqu’elles ajoutent ou dérogent à la loi. Ainsi, lorsqu’un contribuable invoque l’interprétation d’un texte fiscal formellement publiée par l’administration sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, il nesera fondé à s’en prévaloir pour faire échec à une imposition que si cette instruction ajoute à la loi. Dans l’hypothèse inverse, en effet, cette instruction, si elle se contente de recopier ou reformuler la loi, ne vaudra pas interprétation de ce texte. Tel est le paradoxe de l’article L. 80 A que de rendre opposables des dispositions en réalité illégales car prises de manière incompétente. Mais il est vrai que peu de contribuable se piquent de demander l’annulation des instructions qui leur sont favorables…

 

 

La portée et les conséquences da la censure du Conseil d’Etat

 

​L’annulation contentieuse des paragraphes 180 (partiellement) et 200 de l’instruction attaquée a pour effet de faire disparaître ces derniers rétroactivement de sorte que, non seulement ils n’existent plus, mais encore, ils sont réputés n’avoir jamais existé. Aucune conséquence ne saurait donc être tirée par l’administration du fait, pour certains contribuables, de n’avoir pas déféré à l’invitation de souscrire une déclaration rectificative afin de tenir compte de l’instruction du 14 juin 2013. Corrélativement, les contribuables dont le plafonnement aurait été calculé en fonction des revenus mentionnés aux paragraphes 180 (pour les produits attachés aux bons et contrats de capitalisation ainsi que l’assurance-vie) et 200 peuvent prétendre, le cas échéant, à un dégrèvement d’impôt. L’administration devrait logiquement y procéder de manière spontanée si elle fait preuve d’élégance. Mais, dans le cas inverse, une réclamation contentieuse aura le même effet.

 

​L’affaire n’est cependant pas close, dans la mesure où le projet de loi de finances pour 2014 remet l’assurance-vie au centre de la question du plafonnement de l’ISF. En vertu d’un amendement à ce projet, les produits inscrits en compte au titre d’un contrat d’assurance-vie devraient être considérés comme des revenus pour le calcul du plafond de l’ISF. Au prix d’une réécriture du texte, consistant à poser le principe que tous les revenus ayant donné lieu au paiement d’une contribution sociale, réalisés ou non, sont assimilés à des revenus réalisés, on reviendrait ainsi au mécanisme prévu par l’instruction selon lequel les revenus capitalisés des contrats monosupport euros et des fonds euros des contrats multisupports, même s’ils n’ont pas été perçus, viennent s’ajouter aux revenus disponibles pour le calcul du plafonnement. C’est donc le juge constitutionnel qui dira, dans les prochains jours, si ces dispositions sont compatibles avec les principes constitutionnels déjà appliqués. Mais, dans la mesure où les produits inscrits en compte au titre d’un contrat d’assurance-vie multisupportsne sont pas définitivement acquis à l’assuré et que celui-ci ne perçoit ces derniers qu’en cas de rachat du contrat, sous réserve d’ailleurs de leur existence, on peut d’ores et déjà regarder la question comme sérieuse.

 

 

NB : Par décision n° 2013−685 DC du 29 décembre 2013, le Conseil constitutionnel rappelle qu’il avait déjà censuré l’an dernier les dispositions prenant en compte dans le plafonnement des revenus « latents » que le contribuable n’a pas encore réalisés ou dont il n’a pas disposé. Il déclare contraire à la Constitution l’article 13 de la loi de finances pour 2014 intégrant dans le calcul les revenus des bons ou contrats de capitalisation et placements de même nature tels les contrats d’assurance-vie pour méconnaissance de l’autorité de la chose jugée par la décision du 29 décembre 2012. Autrement dit, la nouvelle rédaction du dispositif de plafonnement est regardée comme équivalente à celle de l’an passé, qui avait été censurée. Le dispositif est censuré une deuxième fois.

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Louis Alexandre de Froissard
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