Par Tiphaine Granel le 22/06/15

Retraites en danger

retraite

Ce n’est un scoop pour personne, les régimes de retraites complémentaires AGIRC (cadres) et ARRCO (salariés du privé non cadres) sont en très mauvaises posture. En effet, leur déficit est tellement élevé que les partenaires sociaux se sont engagés dans des négociations pour renflouer ces caisses.

Malgré les 18 millions de cotisants et seulement 12 millions de bénéficiaires, les retraites complémentaires sont obligées de piocher dans leurs réserves ; qui, si l’on continue comme cela, seront épuisées d’ici 2018 pour l’AGIRC et 2027 pour l’ARRCO.

Or, la pension complémentaire représente environ 60% de la retraite totales des cadres et 30% de celle des non cadres. Par conséquent, si ces caisses venaient à disparaitre, cela serait préjudiciable pour un grand nombre de retraités.

Lorsque l’on sait ce que touche, en moyenne, à la retraite un ancien actif, on comprend l’importance de la retraite complémentaire (notamment pour les cadres). Voici quelques exemples (pour une carrière complète et tous régimes confondus) :

pour les anciens salariés : la pension moyenne est de 1 760€ (2 090 € pour les hommes et 1 390 € pour les femmes). Pour un cadre, la pension complémentaire représente donc ici environ 1 056 €. De ce fait, en l’absence de pension, un ancien salarié cadre toucherait seulement 704 € de retraite.

Pour un non cadre, la pension complémentaire représente 528 €.retraite

pour les anciens fonctionnaires : la pension moyenne dans la fonction publique d’Etat est de 2 510 € (2 700 € pour les hommes et 2 370 € pour les femmes).

La pension moyenne pour les fonctions publiques territoriales et hospitalière est de 1 830 € (1 980 € pour les hommes et 1 790 € pour les femmes).

-pour les anciens commerçants (ayant toujours été commerçants) : la pension moyenne est de 1 060 € (1 150 € pour les hommes et 970 € pour les femmes).

pour les anciens artisans (ayant toujours été artisans): la pension moyenne représente 1 030 € (1 130 € pour les hommes et 620 € pour les femmes).

pour les anciens libéraux (ayant toujours été libéraux) : la pension moyenne s’élève à 2 610 € (2 770 € pour les hommes et 2 030 € pour les femmes).

Compte tenu de la faiblesse de certaines pensions (notamment pour les femmes), il est frappant de constater l’importance voire la nécessité des pensions complémentaires.

Ces données montrent bien l’urgence de sauver les régimes Agir et Arrco…

 

Afin de pérenniser les retraites complémentaires, plusieurs idées ont été avancées par les partenaires sociaux, dont celle de fusionner les régimes.

Les causes de ce déficit sont nombreuses mais les principales restent l’augmentation du chômage et l’arrivée des papy-boomers à la retraite.

En effet, l’arrivée de ces générations d’après guerre à la retraite augmente les dépenses et dans le même temps, le fort taux de chômage pèse sur les recettes en réduisant les rentrées de cotisations sociales.

L’urgence aujourd’hui est de sauver ces régimes et en premier lieu l’AGIRC. Il faut repousser au maximum la date d’épuisement des réserves pour trouver des solutions pérennes d’ici là.

Mais même avec ce type de solutions, selon l’Agirc et de l’Arrco, les déficits continueront à se creuser au moins jusqu’en 2035, malgré les mesures correctrices des années passées et quel que soit le scénario économique envisagé.

 

Sans mesure de redressement, le déficit cumulé des deux régimes atteindrait alors 120 milliards d’euros en 2030 et près de 335 milliards en 2040.

cour des comptesLa Cour des Comptes, après un bilan assez alarmant, conseille aux partenaires sociaux de se donner comme objectif un effort annuel de 5 milliards d’euros à partir de 2018. Cela permettrait de repousser l’épuisement des réserves après 2030.

La Cour est consciente qu’augmenter les cotisations et jouer sur le niveau des pensions sera délicat, elle conseille donc de combiner ces dispositifs avec des mesures sur l’âge. Elle évoque un recul de l’âge de départ à la retraite d’un ou deux ans par un report des âges légaux ou en jouant sur l’effet incitatif d’abattements spécifiques.

Mais c’est aux partenaires sociaux de trouver des solutions et rapidement. En effet, ils savent que s’ils ne se mettent pas vite d’accord, le gouvernement risque de reprendre la main sur les négociations.

 

I) Le recul de l’âge de départ à la retraite

Le Medef souhaite que cette disposition passe car c’est ce qui, a priori, rapporterait le plus à court terme.

L’autre idée est que les actifs qui prendraient leur retraite avant un certain âge (67 ans par exemple), se verraient imposer des décotes temporaires ou définitives.

D’après les calculs de l’AGIRC et de l’ARRCO, le recul de cet âge de deux ans étalé sur 4 ans, à partir de la génération 1956 permettrait de dégager 59 à 94 milliards d’euros en 2030 et de 98 à 170 milliards d’euros en 2040.

L’âge de départ légal à la retraite serait alors repoussé à 64 ans.

Si le recul de l’âge de départ à la retraite était d’une seule année, les marges seraient moitié moindres.

D’autre part, le sort de l’AGIRC étant plus inquiétant que celui de l’ARRCO, se sont les cadres qui devront faire le plus d’efforts.

La Cour des Comptes souhaite également une plus grande égalité en traitement entre les cadres et les non cadres, voire une fusion des régimes complémentaires.

 

retraite fusion agirc arrcoII) La fusion des régimes : un danger pour les salariés

Si la fusion était faite, les bénéficiaires ne toucheraient plus qu’une pension complémentaire. Alors, cela parait plus simple mais ce n’est pas sans risques.

La pension de réversion serait la première à subir la fusion. En effet, l’âge minimum pour toucher la pension du conjoint décédé (sans minoration) est de 55 ans à l’ARRCO et de 60 ans à l’AGIRC. Le risque est donc clair : la fusion entrainerait un alignement des âges au moins favorable donc 60 ans.

Cet alignement permettrait de faire une économie de 50 millions d’euros en 2017 (en théorie) mais cela ne résoudrait pas le problème des déficits des régimes.

Le taux de réversion pourrait aussi être remis en question. Néanmoins, pour atténuer l’effet néfaste, deux solutions ont été proposées : une proratisation en fonction de la durée du mariage ou une réversion à la carte. Si le bénéficiaire opte pour cette dernière possibilité, il pourra toucher sa pension complémentaire plus faible au départ en retraite et au décès, son conjoint percevra 60 % de la pension complémentaire. Ou alors il choisit la retraite complète et le conjoint ne percevra que 54 % de la pension de son époux décédé.

Sauf qu’il ne faut pas perdre de vue que, pour les cadres, la pension de réversion est la seule ressource qui vient compenser les carrières perturbées des conjoints (grossesse, congé parental…).

Ensuite, si la fusion était réalisée, il faudrait homogénéiser le taux de cotisation au régime complémentaire. Le taux unique serait 16,40 %, or, aujourd’hui, le taux appliqué aux salariés cotisants à l’AGIRC (tranche B) est de 16,10%. De ce fait, les non-cadres verraient leur salaire net baisser.

Une autre proposition, moins connue mais tout aussi problématique, est celle de la suppression de la Garantie Minimale de Points. Actuellement, tous les salariés cadres gagnants moins que le PASS (38 040€ en 2015) cotisent sur la base d’un forfait qui leur permet d’acquérir 120 points AGIRC.

Donc si ce dispositif disparaissait, ces cadres auraient un salaire plus élevé mais une pension plus faible à la retraite.

Il n’existe aucune solution miracle qui ne heurterait personne. Des sacrifices devront être faits pour éviter le naufrage imminent des régimes de retraites complémentaires.

 

III) Une solution pour les futurs retraités

Les futurs retraités ont, donc, de quoi avoir peur des décisions que pourraient prendre les partenaires sociaux.

Donc, pour les personnes nées entre 1953 et 1957, si elles le peuvent, il faudrait partir à la retraite rapidement. Surtout que les dispositions négociées pourraient se faire dés 2017.

Plusieurs cas se présentent :

si vous pouvez partir à la retraite avec l’âge légal et la durée d’assurance nécessaire, le cumul emploi retraite est une bonne solution. Vous pouvez liquider vos droits à la retraite et reprendre une activité dans le même secteur ou dans un autre. Dans ce cas vous cumulez vos revenus de retraite de professionnels.

Par contre, vous ne bénéficierez plus de la surcote. Mais vous écartez, tout de même, le risque de devoir subir des minorations ou des changements qui seront sans aucun doute en votre défaveur.

si vous pouvez paretraite-n-b-garel_bloc_article_grande_imagertir mais que vous n’avez pas la durée d’assurance nécessaire, il peut être intéressant de racheter des trimestres afin de partir avant les changements annoncés. De plus, vous pouvez toujours reprendre une activité après la liquidation de vos droits à la retraite dans le cadre du cumul emploi retraite.

Mais un rachat de trimestres coûte cher donc si l’opération ne vous est pas favorable, il vaut mieux continuer à travailler pour éviter de subir des abattements définitifs sur vos régimes complémentaires et sur votre régime de base.

si vous ne pouvez partir à la retraite que pour « carrière longue », le cumul emploi retraite ne sera pas possible après. En effet, si vous liquidez vos droits à la retraite avant l’âge légal et que vous reprenez une activité, vous serez surement limité dans la rémunération. De plus, si vous retournez travailler chez votre dernier employeur, vous devrez peut être attendre quelques mois avant de reprendre votre activité. A défaut, une partie de votre pension pourrait être réduite ou suspendue.

si vous ne pouvez pas partir à la retraite avant la mise en place des dispositions négociées par les partenaires sociaux, vous serez contraint de subir les changements.

Mais si vous êtes dirigeant de société, vous pouvez changer de statut et passer en non salarié. En effet, certains régimes non salariés sont très intéressants.

Par ailleurs, devenir non salarié peut être un moyen de diminuer vos cotisations dans les régimes obligatoires.

 

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